Macron et la constitution

La visite du président à Colombey pour célébrer les 60 ans de la Vème République, quelques jours seulement après l'épisode du « selfie au doigt d'honneur » à Saint-Martin, résume à elle seule le paradoxe Macron : soucieux un jour d'incarner une verticalité conforme à l'esprit monarchique des institutions, capable un autre jour d'abaisser et même d'humilier la fonction présidentielle dans des accès de vulgarité qui ne sont pas sans rappeler certaines outrances d'estrade de sa campagne.

Finalement, après avoir fait quelque peu illusion au début de son quinquennat, Macron semble prolonger la série noire des derniers présidents, désacralisant chacun à sa manière, — l'activisme et une vulgarité savamment entretenue pour Sarkozy, la « normalité » revendiquée et la médiocrité effective pour Hollande —, la figure du chef de l'État. Mais faut-il s'arrêter là comme la plupart des commentateurs politiques, enfermés dans une échelle de temps qui les empêche de voir au-delà de deux ou trois mandats présidentiels ? Ce serait manquer à notre vocation qui est de pratiquer l'empirisme organisateur sur le temps long.

Pour ce qui est de l'incarnation, Giscard ou Chirac, laissaient eux-aussi beaucoup à désirer... Quant à Mitterrand et De Gaulle, c'est en grande partie l'éloignement qui nous fait oublier que, loin d'incarner en leur temps la fonction arbitrale au-dessus de la mêlée, dont le prince Jean de France nous rappelle dans un article récent du Figaro qu'elle constitue l'héritage monarchique dans les institutions présentes, ils furent, véritables signes de contradiction dans des contextes particulièrement troublés, haïs par les uns et adulés par les autre : De Gaulle n'était-il pas qualifié de fasciste et de dictateur par la gauche, en 58 comme en 68 ? N'a-t-il pas été la cible d'attentats fomentés par la droite après le « largage » de l'Algérie ? La victoire de Mitterrand en 1981 n'a-t-elle pas fait craindre à certains l'arrivée des chars soviétiques à Paris ?

La réalité est que la grande faiblesse de la constitution de 58 est d'avoir voulu rétablir le roi sans l'hérédité, qui est la condition de son indépendance, de son impartialité, de sa légitimité, de sa formation et de son attachement familial et patrimonial à l'intérêt général. C'est cette vérité que nous avons la noble charge de rappeler à nos contemporains !

Stéphane BLANCHONNET

Article paru sur a-rebours.fr et dans Le Bien Commun


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