Le communautarisme

Parce qu'elle est contre-révolutionnaire, l'AF critique la conception individualiste de la société qui prévaut dans l'idéologie libérale : là où la République ne voit que des Individus et l'État, nous considérons que ce sont les familles, les communes, les provinces, les métiers, les églises, qui sont les véritables membres et organes du corps social. Mais l'accent mis sur la communauté, facteur d'enracinement, plutôt que sur l'individu, ne doit pas être considéré comme un dogme absolu pour au moins trois raisons.

D'abord, la pensée de Maurras se situe dans l'Histoire. Contrairement à certains tenants des sociétés holistes contre les société individualistes, les maurrassiens n'érigent pas cette opposition en système. Nous n'invitons pas nos membres à vivre en autarcie dans des communautés figées ou à considérer n'importe quelle société primitive, aussi fruste soit-elle, comme supérieure à la société moderne, sous prétexte qu'elle serait moins individualiste. De même notre régionalisme a pour but de corriger le jacobinisme pour renforcer l'identité nationale à l'intérieur de l'ensemble français, pas d'ouvrir la voie aux séparatismes.

Ensuite, nous prenons acte des bouleversements introduits par l'exode rural, la baisse de la pratique religieuse catholique, le recul des métiers des secteurs primaires et secondaires. La post-modernité a ébranlé le « pays réel » plus radicalement en cinquante ans que le jacobinisme en un siècle et demi. Le ré-enracinement ne peut donc pas seulement être proclamé. Il faut en repenser les modalités.

Enfin, le caractère massif des actuels phénomènes migratoires, conjugué au développement dans les populations immigrées mal intégrées d'un renouveau communautaire et religieux puissant, nous oblige à réviser notre conception communautaire de l'intégration, encore défendue dans les années 90. Ni l'intégration, ni la fameuse assimilation républicaine, ne seront possibles tant que le problème demeurera aussi massif et tant que ne seront pas réaffirmés clairement, au-delà de la seule laïcité, les privilèges naturels de la culture française traditionnelle sur son propre sol.

Stéphane BLANCHONNET

Article paru sur a-rebours.fr et dans L'AF2000


Vos commentaires

Le 27/11/2017 à 10:45, Nathanaël Uhl a écrit :
Cher Stéphane,

Cette note me laisse un peu sur ma faim. Je sais le problème du format imposé mais, je crois, tu gagnerais à poursuivre cette note en parlant de vos propositions et en définissant clairement ce que c'est que d'être communautariste aujourd'hui et si l'AF l'est ou si elle combat cette approche.

Là, en toute amitié, je trouve que tu campes sur un constat qui pourrait se résumer finalement au primat du maître de Martigues "politique d'abord". La politique étant une affaire de rapport de forces, elle est donc évolutive, ce qui exclut, de facto, toute position holiste de votre côté.

Mais, pour ce qui me concerne, je considère qu'une communauté, quelle qu'elle soit, est le fruit de l'adhésion volontaire, et pas naturelle, des individus qui la composent pour un temps donné, celui de l'accord à l'appartenance.

Je pense, en toute modestie, que tu gagnerais à intégrer cette dimension dans ta pensée, pas forcément pour la faire tienne cela dit.

Amitiés,

Nathanaël
Le 27/11/2017 à 04:30, Michel MICHEL a écrit :
N'abandonnons pas nos principes pour des raisons d'opportunité (électorale).

Ce qui menace la France, ce n'est pas les communautarismes; mais c'est la politique d' immigration.

Les communautés sont une réaction normale et il est temps que les souchiens ne se considèrent plus comme des "individus"...
Le 30/11/2017 à 10:22, Lallement a écrit :
Dans les années 1990, le débat portait sur le choix du slogan de la campagne d'AF, entre "Monarchie Fédérative" ou "Monarchie communautaire". Si le premier l'avait emporté sous l'impulsion prodhonnienne de Nicolas Portier, en revanche le "communautaire" était assumé. Particulièrement dans une série d'articles sur le Corporatisme; reprenant en cela les analyses des non-conformises des années 30 etparticulièrement ceux de la Jeune Droite avec Fabrègues et Maulnier.

Michel Michel n'a donc pas tort lorsqu'il conseille de revenir sur ce concept, aujourd'hui disqualifié par le politiquement correct qui l'avait d'ailleurs mis à la mode dans l'après 68; le fameux vivre en "communauté". Il s'agissait d'ailleurs là, de "construire" des communautés libératrices et solidaires alors que pour les maurrassiens il a toujours été question de "libérer les communautés naturelles" étouffées par le jacobinisme. Nous ne sommes plus certains aujourd'hui que nos anciennes communautés soient en mesure de renaître. La deconsruction du Pays Réel a été massive et méthodique depuis 1945, sous les coups de la société Industrielle. Il faut relire là dessus les analyses de Philippe Aries et de Pierre Debray afin d'entamer une réflexion prospective s'appuyant sur un sain exercice d'empirisme organisateur. Stéphane est le mieux placé pour cela mais il y a du pain sur la planche.

Amitié, Philippe
Le 02/12/2017 à 10:12, Stéphane Blanchonnet a écrit :
Chers amis,

Merci pour vos commentaires, tous de haute tenue.
Nathanaël, je ne crois pas que l'on puisse définir la nation sur une base purement volontariste. Il y a la nécessité (l'homme est un animal social) et l'héritage (notre être est forgé par notre culture, notre langue, notre civilisation, avant même que nous puissions dire "je" ou penser "je") d'abord. La volonté ensuite. De ce point de vue nous ne sommes pas si éloignés de Renan.
Michel, tu as raison évidemment sur la nécessité pour les Français de souche de sortir de l'individualisme (j'ai d'ailleurs pensé à toi plusieurs fois en écrivant cette chronique puisque tu as été la référence de l'AF sur la "communauté" ces dernières années !). Cela dit, notre prudence actuelle est moins dictée par l'électoralisme (et même pas du tout !!) que par le sentiment des périls mortels que le communautarisme fait peser sur la nation dans le contexte de l'immigration massive.
Philippe, ton rappel des débats des années 90 est un excellent approfondissement du passage de ma chronique où j'évoque nos positions à cette époque. Merci aussi pour tes encouragements !

Bien à vous trois !
Le 12/12/2017 à 02:47, Kryzaal a écrit :
Internet permet d'être intégré physiquement au pays réel tout en appartenant à des communautés plus vastes avec lesquelles on communique entre deux rassemblements physiques.

Notre chance est là, car la question du communautarisme est surtout stratégique aujourd'hui.